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Chauffer les corps plutôt que les murs

L’énergie coute de plus en plus cher et un nombre croissant de ménages n’arrive plus à payer leurs factures d’électricité et de gaz. C’est donc le bon moment pour s’interroger sur nos manières de nous chauffer, pour se demander s’il ne faut pas repenser cette question de manière assez fondamentale. De plus, pour celles et ceux qui ont une fibre environnementaliste, il y a aussi le souci que, peu importe la forme d’énergie utilisée, son impact environnemental est important et contribue la détérioration continue de notre milieu de vie, air, terre, eau, climat, biodiversité, etc..

Depuis un certain nombre d’années, à la maison, nous pratiquons toutes sortes de méthodes visant à consommer (beaucoup) moins d’énergie. Mais ce n’est que tout récemment que j’ai découvert le projet bruxellois SlowHeat dont les chercheurs développent une approche carrément révolutionnaire, disons-le. La région bruxelloise avait découvert que sa stratégie d’isolation des bâtiments lui coutait horriblement cher pour des résultats pas réellement fort probants. Elle a donc proposé à un groupe interdisciplinaire de chercheurs, sciences humaines autant qu’architectes et ingénieurs, de se pencher sur cette question.
Après la guerre 40-45, le chauffage central s’est généralisé. Ensuite, en raison des crises énergétiques des années 70’, on a commencé péniblement à tenter de mieux isoler les habitations, dans le but de pouvoir les chauffer confortablement en consommant moins d’énergie. Cependant, malgré ces efforts, l’objectif est toujours resté le même, chauffer l’ensemble de l’habitation, plus ou moins complètement, en considérant qu’il s’agissait là d’un problème purement technique et que le comportement des occupants était assez secondaire.

Mais plutôt que de s’intéresser à l’habitation, ne faut-il pas s’intéresser avant tout à ses occupants ? Le but doit-il être de rendre le logement confortable ou de rendre la vie des occupants confortable ? Et c’est là toute la différence...

 L’approche fourmi

Ou approche SlowHeat.

L’idée générale est de procurer aux occupants la chaleur dont ils ont besoin plutôt que de chercher à chauffer la maison, murs et air. On envisage donc tous les moyens possibles pour y parvenir. Il faut insister sur le fait qu’il n’y a pas de réponse magique, chaque situation est différente, chaque individu a une sensibilité différente. Les méthodes peuvent donc être très variées et progressivement être testées et adoptées au rythme de chacun.

  • Vêtements (corps, tête, mains, pieds) multi-couches ;
  • Type d’activité ;
  • Locaux (taille, ensoleillement, isolation) ;
  • Chauffage individuel accumulé (bouillotte, noyaux, brique, etc...) ;
  • Chauffage individuel par contact (cape chauffante, couverture chauffante, chancelière chauffante, siège chauffant, etc...) ;
  • Chauffage individuel par convection (radiateur sous table) ;
  • Chauffage individuel par rayonnement (panneau rayonnant pour le bureau ou la table).

Un logement froid c’est un logement humide ? Pas vraiment, c’est largement un préjugé !

Une température plus basse est-ce mauvais pour la santé ? au contraire, c’est plutôt meilleur. Et pour le confort thermique des petits enfants, une température plus basse que pour les adultes, c’est mieux.

Est-ce facile ? absolument pas. On ne change pas des décennies d’habitudes d’un claquement de doigts, sans parler de l’évolution des règlementations qui n’encourage pas beaucoup cette démarche. Répétons-le, chacun doit suivre son rythme, choisir et expérimenter ses propres méthodes parmi toutes celles proposées.

Cuisine afghane
Faculté d’Architecture - ULg

 L’approche cigale

Ou approche chauffage central.

On chauffe confortablement l’ensemble de la maison, avec parfois des nuances (vannes thermostatiques), et plus ou moins en continu, car une fake news circule obstinément : la consommation augmente si on coupe le chauffage la nuit, à cause de la remise en température du matin !

Mais aujourd’hui, on recommande en plus vigoureusement de bien isoler toute la maison. C’est la célèbre lutte contre les "passoires énergétiques", encouragée voire imposée par la plupart des dirigeants politiques et économiques. Cependant, rénover sa maison pour bien l’isoler coute un pont. C’est d’ailleurs pourquoi les industries du bâtiment se frottent les mains. Mais, comme toujours, cet investissement représente invariablement une consommation d’énergie, directe ou indirecte : environ un kilo d’équivalent pétrole pour chaque 6€ investis. Comme on dit chez SlowHeat, « Rénover c’est mobiliser beaucoup de matériaux et dépenser en moyenne 100 000€ sur 30 ans (±250-300€ par mois) pour maintenir ses factures probablement inchangées. »

De toute façon, cette approche est couteuse et environnementalement impactante, soit à cause de la consommation d’énergie (car il n’y a pas assez d’énergies renouvelables pour tous et pour tout), soit à cause des investissements nécessaires. Cette approche est donc surtout réservée aux plus aisés.

Louis Possoz
mardi 4 octobre 2022


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